Luc Pierron

Luc Pierron”J’étais chercheur, puis cadre dans l’économie sociale et solidaire et je suis devenu haut fonctionnaire”

  • Pouvez-vous vous présenter et présenter votre parcours avant votre entrée à l’ENA (origine familiale et géographique, valeurs, parcours professionnel, engagements divers…)?

J’ai 31 ans et suis originaire de Metz. Juriste de formation, j’ai d’abord accompli un tour de France universitaire, qui m’a mené sur les bancs des facultés de droit de Nancy, Lyon, Montpellier, avant la Sorbonne et Assas. Puis, j’ai cumulé différentes expériences dans le secteur privé en une petite dizaine d’années. En droit, je me suis rapidement spécialisé sur les questions relatives au travail et à la sécurité sociale. Cela m’a conduit en cabinet d’avocats, puis dans la rédaction d’une thèse de doctorat sur les régimes spéciaux des fonctionnaires et les réformes de la sécurité sociale en France. J’ai ensuite rejoint l’économie sociale et solidaire, à la MGEN, puis à la Mutualité Française, en tant que conseiller du président Thierry BEAUDET. J’y assurais un rôle de plume et intervenais dans le champ des affaires publiques et de la communication institutionnelle.

  • Pouvez-vous décrire la ou les expériences les plus enrichissantes de votre carrière de haut fonctionnaire ? Les moments clés de votre parcours ?

Très modestement – ma carrière dans la fonction publique démarrant tout juste – mes deux stages ENA, à l’ambassade de France en Ukraine, ainsi qu’à la préfecture de l’Eure, se sont révélés de premiers (et de véritables) leviers d’accomplissement. J’étais à la recherche de nouvelles responsabilités, plus en lien avec l’action publique et mes aspirations personnelles et professionnelles. À l’évidence, je ne pensais pas découvrir le service public dans la crise sanitaire que nous vivons aujourd’hui. Dans l’œil du cyclone, on trouve rapidement de l’utilité et du sens à son action. En vivant une expérience accélérée, on sait aussi rapidement si le choix d’intégrer la fonction publique est le bon. C’est mon cas.

  • Que vous a apporté le fait de faire l’ENA ? En quoi avez-vous grandi ?

Dans le court laps de temps qui me sépare des concours, deux choses : des expériences passionnantes, dans de grandes institutions de la République, auprès de personnalités remarquables ; des collègues et amis, avec qui je compte entretenir des relations de long terme.

  • En quoi le fait d’être devenu haut fonctionnaire après une première vie professionnelle, a-t-il constitué un atout dans votre contribution à la mise en œuvre d’une politique publique ? de réformes ? N’hésitez pas à donner un exemple. 

Dans une crise comme aujourd’hui, lorsque l’on se retrouve face à une entreprise, une chambre consulaire ou une fédération professionnelle, un passage dans le secteur privé est considéré et reconnu. Il légitime l’action de l’État, en démontrant qu’il sait s’entourer de profils variés, jeunes et moins jeunes. Au moment d’approfondir un bilan comptable pour imaginer le meilleur accompagnement par les aides publiques, cette première vie professionnelle sait aussi être appréciée à sa juste valeur. Idem dans la mise en œuvre du plan de relance, lorsqu’il s’est agi de détecter, de suivre et de soutenir les porteurs de projets, pour leur permettre de participer à la reprise économique du pays. Sur le terrain, être en mesure de se positionner au niveau de son interlocuteur et de parler le même langage que lui ont à plusieurs reprises été déterminants.

  • Pourriez-vous partager une anecdote qui est particulièrement mémorable d’une situation professionnelle au cours de votre carrière ?

C’était en Ukraine, aux premiers jours de la crise sanitaire. La diffusion des gestes barrière débutait tout juste. Alors que j’accompagnais l’Ambassadeur Étienne de Poncins à une réunion du G7 Reforms (i.e. un groupe de soutien aux réformes, réunissant les ambassadeurs en Ukraine de sept pays parmi les plus grandes économies mondiales), les premières minutes furent consacrées à quelques traits d’humour sur la manière dont chacun avait l’habitude de se laver les mains. Ainsi, dès l’une de mes premières réunions internationales, que je dois à la confiance rapidement accordée par mon maître de stage, la petite histoire a rejoint la grande ; la diversité culturelle en plus.

  • Quel conseil donneriez-vous à quelqu’un qui, après une première expérience dans le privé, souhaite s’engager au service de la puissance publique ?

Je me suis longtemps interrogé sur la pertinence à m’engager dans un concours administratif. Des aléas de carrière ont finalement contribué à me faire changer de pied. À toutes celles et à tous ceux qui se poseraient la question, je veux délivrer un seul message : ne laissez pas passer votre chance et prenez votre risque. Il y a de la place pour des parcours différents au sein de la fonction publique. L’action et la transformation publiques ont besoin de nouveaux talents, d’où qu’ils viennent professionnellement. Le concours de l’ENA offre de belles possibilités de reconversion ou, ce qui était mon cas, de contribuer à l’intérêt général autrement.

  • Enfin, en quelques mots…
  • Les causes qui vous tiennent à cœur : l’égalité des chances, la ruralité et les enjeux de sécurité
  • Deux lectures inspirantes : ”Leurs enfants après eux”, de Nicolas Mathieu et ”Ceux qui restent”, de Benoît Coquard
  • Une citation qui vous inspire : ”Il y a trois sortes de savoir : le savoir proprement dit, le savoir-faire et le savoir-vivre; les deux derniers dispensent assez bien du premier” (Talleyrand)
  • Le meilleur conseil qu’on vous ait donné : savoir s’écouter, tout simplement